Pays de Serres

Ses villages, hameaux et fermes disséminés au sommet de crêtes forment quelquefois de véritables et majestueux promontoires. On y pratique le maraîchage, les cultures céréalières dont l’orge utilisée dans les brasseries locales comme la brasserie fermière des Cèdres qui est une des rares brasseries artisanales françaises à produire son orge et son houblon. Et bien sûr c’est le berceau du pruneau d’Agen que l’on retrouve dans nombre de recettes traditionnelles et locales : le lapin aux pruneaux, tourte aux pruneaux, galette aux pruneaux…où l’eau de vie d’armagnac n’est jamais loin. Agen étonna aussi Curnonsky et Rouff avec ses brézolles d’Agen, rouelles de veau escalopées en fine sauce bordelaise.

Penchons-nous sur ces deux fruits que sont le pruneau d’Agen et le raisin de chasselas et qui ont façonné le paysage de ce terroir et qui ont connu des fortunes opposées.

Le pruneau d’Agen

Le pruneau serait arrivé de Chine sur le pourtour méditerranéen dont le soleil était propice à son séchage naturel au soleil. Les médecins grecs, romains et arabes recommandent ses vertus diététiques et nutritionnelles. C’est Au XIIe siècle des Templiers défaits en croisade rapportent en France des plants de pruniers de Damas. Les moines-soldats font à ce titre l’objet de nombreuses critiques, beaucoup estimant qu’ils se sont rendus en Orient « pour des prunes ». L’expression est restée !

Les moines bénédictins de l’abbaye de Clairac (à quelques dizaines de kilomètres d’Agen) tirent néanmoins avantage de la situation et plantent quelques-uns de ces pruniers. Ils ont surtout la bonne idée de greffer les pruniers locaux avec ceux ramenés de Syrie, donnant ainsi naissance à une nouvelle variété de fruit, la prune d’Ente. Celle-ci s’adapte bien au climat du Sud-Ouest. Puis nos frères ingénieux décident de faire sécher ces fruits. D’abord au soleil puis sur des claies dans un four à pain à chaleur modérée.

Les pruneaux sont transportés en gabarre du port d’Agen jusqu’à celui de Bordeaux avant d’être chargés à bord de navires marchands. Dès le XVIIe siècle, les marins apprécient particulièrement ce produit dont chaque baril était marqué « pruneaux d’Agen ». Facile à conserver, goûteux, c’est surtout aussi un aliment essentiel contre le scorbut, ce que les navigateurs grecs avaient probablement déjà découvert bien avant eux. Il en était de même avec les chinois qui savaient conserver la choucroute riche en vitamine C bien avant que le capitaine Cook ne l’impose sur ses vaisseaux.

Le pruneau d'Agen bénéficie d’une IGP dont le cahier des charges impose un taux d’humidité de 35 % au maximum qui doit être mentionné sur l’emballage. Son aire géographique couvre six départements, grosso modo de Bordeaux à Montauban et d’Auch à Figeac. Pour une production annuelle de 40 000 tonnes issus de 11 500 hectares et 1140 producteurs dont 30% sont exportés.

Le chasselas

Spécialité, jadis, de Port Sainte-Marie et de Prayssac, ces villes célèbrent désormais, hélas, ce superbe raisin de table comme un élément de patrimoine, un monument historique, quasiment disparu. Fêtes, halles, marchés dédiés, défilés courses cyclistes autour de ces grappes ne sont plus que des souvenirs. De même que les jolies ciseleuses, jeunes filles qui paraient le raisin chez les producteurs. Voilà un produit du terroir, bien présent dans le recensement de Curnonsky des années 30 et qui mériterait de revivre aujourd’hui.