Albigeois
Au cœur du département du Tarn, la ville d’Albi a façonné son terroir, l’Albigeois, sous la forme d’un croissant ouvert sur l’ouest. L’ouest et au loin son vaste océan atlantique qui a attiré l’un des plus illustres albigeois, le navigateur et explorateur Jean-François de Galaup, comte de Lapérouse, dit Lapérouse. Il conduisit ce qui fut la plus grande expédition maritime de tous les temps, commanditée par Louis XVI dont ni l’un, ni l’autre hélas, n’en verront l’aboutissement. Rendons lui hommage et abordons donc son terroir sous le signe de l’exploration.
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Une exploration dans le temps, tout d’abord avec la liste vertigineuses des spécialités figurant au Trésor Gastronomique de France (Edition 1933) pour la seule ville d’Albi :
Melon, Pâtes alimentaires, Bougnettes, Gras-double albigeoise, Melsat (boudin blanc), Gigot au genièvre, Civet à l’Albigeoise, Confits d’oie et de Canard, Canard à l’Albigeoise, Foie de porc salé au radis, Fèche sec, terrines et Pâtés de foie gras truffés, Lièvre en civet. Et pour le sucré : Navettes, Gimblettes, Petits Jeannots (gâteaux). Rien que ça ! Avant Curnonsky, les inspecteurs du guide UNA (l’Union Nationale Automobile) concurrent du Michelin n’avaient retenu que les curbelets (gaufrettes fines et sèches enroulées en forme de tube) et les échaudés (biscuits très fermes, qui tirent leur nom de la première phase d'échaudage -pochage de la pâte, dans l'eau chaude avant cuisson au four très chaud une vingtaine de minutes) qui ne s’appelaient pas encore Petit Janot ou Jeannot d’Albi. Sec, triangulaire, ce biscuit est composé de farine, eau, levure de boulanger, sucre roux et sel, parfumé à l’anis ou graines de fenouil.
À l’Occident, l’extrémité nord-ouest du croissant à Cordes-sur-Ciel, se trouve aujourd’hui le domaine Caprioli qui produit l’huile d’olive « Du pays de Cocagne » ainsi que des pâtes d'olives aux herbes, des tapenades, des sels aromatisés, des vinaigres balsamiques et les fameux sott'oli. Ce sont des condiments (ail, oignon…), légumes (tomates séchées, artichauts, aubergines et poivrons grillés…) confits dans l’huile d’olive qui se dégustent en ‘‘antipasti’’.
Toujours à l’ouest, mais dans le Gaillacois se trouve la Maison Bruyère à Lagrave, biscuitier artisanal depuis 1964 qui fabrique les Croquants de Cordes. Ce sont des petits gâteaux secs aux amandes composés de blancs d’œufs, sucre, farine, poudre et brisures d’amandes. Spécialité de Cordes-sur-Ciel, ces biscuits rustiques remonteraient au XVIIe siècle. Zappés dans l’inventaire de Curnonsky (il cite les croquants de Nîmes, Marseille ou de Bort…mais pas ceux de Cordes !), ils sont par contre bien présents dans l’édition « Midi Pyrénées » du CNAC de 1996 qui en donne la recette.
Si le terme de croquant exprime en général un biscuit extrêmement dur, celui de Cordes est extrêmement fin ! Selon la légende, la récolte d’amandes étant abondante, un aubergiste du vieux Cordes aurait eu l’idée de cette recette de couques enfournées à feu doux après la fournée de pain, pour profiter des braises. En Alsace il existe une version de spécialité ainsi trouvée par sérendipité devant le four à pain mais salée et avant la fournée et dans les flammes, avec la Flammeküche…
La navette albigeoise, dont la forme évoque la navette ou la quenouille des métiers à tisser, est, quant à elle, un biscuit à base de pâte sablée découpé en forme de losanges décorés d’amandes entières, saupoudré de sucre. Dans la recette d’origine, il est parfumé de cédrat confit comme l’est la Gimblette, biscuit en forme d'anneau de 50 grammes environ également parfumé au zeste de citron ou à la fleur d’oranger. Réalisées à l’origine entre Carême et Pâques, la forme en anneau de ces biscuits permettait de les accrocher sur les branches de gimel (branche de laurier ou de romarin) le dimanche des Rameaux.
Naviguons maintenant vers l'Orient : de vastes terres de cultures maraîchères, céréalières, vergers et châtaigniers. Et qui dit châtaigniers dit miel de châtaigner du Tarn. Il en est un excellent, produit par La Goutte d’Or Albigeoise à Rouffiac.
Un peu plus au nord sur le plateau de Virac, Nicolas de Moor fabrique des fromages au lait de vache : tome, lactiques (yaourts, fromages blancs et des fromages type St Marcellin) dans sa fromagerie artisanale « selon des méthodes ancestrales». En 2015 il crée un fromage à pâte molle "Le Rouge Brique de l’Albigeois", évidemment en honneur à la ville d’Albi et à sa cathédrale, la plus grande cathédrale de briques ( rouges ) au monde.
Et vers le sud, ça distille sec !
À Villeneuve-sur-Vère, la Ferme-distillerie-occitane fabrique du whisky dans l’Albigeois depuis 1941 (famille Castan) et Laurent Cazottes, personnage haut en couleurs, produit des liqueurs à partir des fruits de son propre verger cultivés en agriculture biologique et en biodynamie.
Mais voilà qu’au cours de notre voyage se pointe une île à l’horizon ! Ce n’est pas Vanikoro, rassurez-vous, mais le marché couvert d’Albi, ouvert du mardi au dimanche en matinée et jours fériés. Escale idéale pour se ravitailler en produits du terroir, fruits et légumes de saison, plats typiques comme les radis au foie salé, les respountjous (plante sauvage qui se déguste en salade ou en omelette), l'ail rose de Lautrec, les spécialités charcutières : bougnette, boudin, melsat, saucisse, saucisson, jambon de pays, fritons… Allez, on jette l’ancre !