Lacaunais
Les monts de Lacaune, plateaux de moyenne altitude (800 mètres) à l’est du Tarn et à l’extrémité sud du Massif Central ont un air pur ! Et cet air, ou plutôt ces vents, sont particulièrement propices au séchage des salaisons. La situation géographique du village de Lacaune, « entre sept monts », a toujours été propice aux salaisons. La combinaison des climats océanique et méditerranéen ont une influence bénéfique sur leur séchage et leur affinage. Ainsi, le vent d’autan (altanus signifie "vent de la haute mer") qui vient de la Méditerranée et sévit jusque dans le midi toulousain a pour particularité d’assouplir le produit alors que le vent du nord est plus propice à son séchage.
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« Lacaune » est un mot qui ne peut être prononcé sans que l’on pense immédiatement jambon, saucisse sèche et saucisson. Comme un réflexe, une évidence ! Le réflexe du terroir.
La documentation contemporaine insiste sur le fait que cette réputation ne date pas d’hier. Elle en veut pour preuve le Livre Vert, manuscrit composé de soixante-dix-huit chartes des XIIIe et XIVe siècles émanant du pouvoir seigneurial précieusement conservé à l'Hôtel de Ville de Lacaune. L'un de ses textes, daté de 1336, réglemente la profession des Mazeliers, ancêtres des salaisonniers d'aujourd'hui. Oui mais voilà lorsque Curnonsky et De Crozes y passèrent pour établir leur inventaire entre 1928 et 1932, aucune trace de Jambon de ni de saucisse sèche à Lacaune ! Ils y avaient par contre repéré ses excellentes truites et ses tripoux de la montagne !
De nos jours un peu plus d’une trentaine de salaisonniers locaux ont porté ces produits vers la notoriété nationale et même internationale en protégeant leur savoir-faire par l’obtention, en 2015, de deux indications IGP : Jambon de Lacaune IGP d’une part et Saucisson de Lacaune ou Saucisse sèche de Lacaune IGP qui couvrent toutes deux 11 communes ( 9 du Lacaunais, 2 du Montredonnais).
Parmi ces maisons emblématiques, les plus anciennes, Milhaud (fondée en 1926), Fourgassié (1947) et Oberti (1956), ont ouvert la voie aux René Pujol, Le Ray-Gal et plus récemment Millas dont l’aventure a débuté en 1995.
Mais quelle est donc la différence entre saucisse sèche et saucisson ? Sémantiquement, de quoi s’agit-il au juste ? En fait la principale différence entre un saucisson sec et une saucisse sèche artisanale est la forme que prennent ces deux charcuteries. Le saucisson, fabriqué à partir d'un boyau naturel droit, a une forme longue, mais peu régulière et trapue. La saucisse sèche est fabriquée à partir d'un boyau que l’on plie afin de pouvoir la suspendre sur des perches en bois pour le séchage. Ce qui qui lui donne sa forme finale de serpentin représentant des « U » et son appellation « saucisse à la perche ».
Ainsi si vous prêtez l’oreille dans une charcuterie occitane, ou sur le marché, il n’est pas rare d’entendre « un aller » ou « un aller-retour » suivant que le client souhaite un « demi-U » ou un « U » complet de saucisse sèche, voire… 1 mètre ou « la complète » (3 ou 4 aller-retours ! ).
Ce serait ingrat de notre part d’ignorer les autres spécialités proposées par les salaisonniers et forcément excellents charcutiers de Lacaune, même si celles-ci peuvent puiser leurs racines dans d’autres terroirs occitans :
-La bougnette, grosse boule à la fois ferme et moelleuse d’environ 10 cm de diamètre préparée à base de poitrine et de gorge de porc cuites dans un bouillon aromatisé, hachées et mélangées à une panade d’œufs et de mie de pain.
-Le melsat, sorte de boudin blanc à base de viande et d’abats de porc (gorge, couenne et (ou) rate, foie), de pain, d’œuf, de sel, de poivre et d’aromates (muscade, thym).
-Le galabar, boudin d’environ de 12 à 20 centimètres de long pour un diamètre de 5 centimètres. Il est composé de sang (30 à 50%), de viande de tête de porc, de couenne et éventuellement de langue, de poumon, de cœur ; le tout relevé d’épices. Un cousin, du moins par son apparence, de la « saucisse noire » ou Schwartzwurst alsacien.
La ville phare de ce terroir a aussi donné son nom à une race ovine qui se décline en agneaux de boucherie : Lacaune viande, et en brebis : Lacaune lait.
La brebis Lacaune est de loin la championne de France en matière de production de lait. Au cours des 170 jours de traite annuels elle produit 330 litres de lait quand la manech à tête rousse en produit 240, la basco-béarnaise 220, la manech à tête noire 175, et la corse…environ 150 litres. Le lait des brebis Lacaune est majoritairement destiné à la transformation fromagère et plus particulièrement à celle du Roquefort. Les petits mâles, quant à eux, suivront la filière des agneaux de boucherie.
Et ce lait de brebis, à Fontrieu, Lou Malignol, s’est spécialisée dans sa transformation en fromage avec une démarche fromagère bien spécifique à elle en utilisant du coagulant végétal qui convient aux végétariens.
Côté pâtisserie le village de Brassac (1300 ha) dans le Sidobre, un terroir dans le terroir, revendique le meilleur « casse-museau » du monde. De l’occitan cachamusèl « écrase museau » c’est une pâtisserie élaborée à partir de lait de brebis à laquelle est liée une sympathique légende. Il était une fois…au Moyen-Âge, un dragon diabolique qui hantait les eaux de la rivière. Pour le calmer, les Brassagais ont fait un gâteau croustillant d'apparence et fondant à l'intérieur, il se dit que c'est en le jetant sur la gueule du monstre que sa croûte dure lui a cassé le museau et qu'il a débarrassé les eaux de l'Agout !
En parlant d'eaux...ce terroir profite aussi de l’environnement préservé du parc naturel du Haut-Languedoc pour y faire jaillir une eau minérale naturelle, celle du Mont Roucous. Quel beau pays !